M. Raoul-Duval, chargé d’affaires de France à Tunis, A M. Couve de Murville, Ministre des affaires étrangères
Tunis, 16 juin 1961
M. Ladgham que j’ai vu cet après-midi a évoqué le problème du Sahara.
1-Sur le plan général, il a marqué les inquiétudes de son gouvernement à cet égard. J’ai saisi cette occasion pour lui exposer les vues contenues dans votre télégramme n°1488. Le secrétaire d’Etat à la Présidence m’a écouté avec intérêt, notamment lorsque je lui ai indiqué que si l’Algérie choisissait d’être un Etat souverain et si elle voulait bâtir son avenir avec la France, nous serions prêts à réunir tous les pays riverains pour voir comment on pourrait adapter la structure de l’O.C.R.S. à la situation nouvelle.
M. Ladgham s’est borné à déclarer que malheureusement, les Algériens avaient une position rigide sur le fond du problème.
2-Mon interlocuteur s’est en revanche longuement étendu de nouveau sur les revendications de la Tunisie concernant Garet el Hamel. Il a, d’une part, laissé entendre que le gouvernement tunisien souhaitait régler ce problème avec la France plutôt qu’avec une Algérie indépendante. Il a d’autre part rappelé la convection de 1910. Enfin, il a cru devoir tirer parti des récents incidents survenus dans la région de Fort Thiriet (vos télégrammes nos 1298 et 1310)1 pour prétendre que de tels faits ne surviendraient pas si la Tunisie avait la responsabilité de la surveillance de la frontière entre Fort Saint et la borne 233. Le gouvernement tunisien savait en effet que les auteurs. J’ai signalé à cette occasion que le gouvernement libyen avait, en réponse aux représentations de notre ambassadeur à Tripoli, fait savoir qu’il entendait maintenir les assurances qu’il avait précédemment données et selon lesquelles il ne permettrait pas aux rebelles algériens d’agir à partir de son territoire.
Quoi qu’il en soit, a repris M. Ladgham sur un ton très vif, le gouvernement tunisien entend faire respecter ses droits sur la portion de frontière allant jusqu’à Garet el Hamel. Il prendra à cet effet et dans un délai sans doute rapide toutes dispositions nécessaires quels que soient les obstacles que la France comme le F.L.N. pourraient lui opposer. J’ai rappelé à mon interlocuteur notre position en la matière.
1 Ces deux télégrammes, du 30 mai, non reproduits, faisaient état d’incidents survenus à proximité de la frontière algéro-tunsienne et pour lesquels l’ambassadeur de France à Tripoli avait été chargé de protester auprès du gouvernement libyen.
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